Retour sur l’IronMan de Nice par Raphaël GASQUET. Encore bravo pour cette course et merci pour ton récit !
« Prologue : quand tu remets le couvert
20 août 1971. Naissance.
2021 : cap de la cinquantaine, et comme il y a dix ans, ma chérie m’offre une inscription IronMan ; destination Nice.
Chapitre 1 : quand tu te prépares en période de crise sanitaire
C’est le quatrième IronMan, mais le dernier date d’il y a dix ans d’une part, et les trois premiers étaient plus ou moins plats d’autre part. Ce sera donc une première fois avec du dénivelé important.
La préparation a été un peu particulière, comme pour tout le monde… Un couvre feu qui empêche d’aller courir le soir, des piscines fermées, moins pratiques pour nager, et une limitation à 10 km de chez soi, ce qui restreint un peu les sorties longues… Bref, des limitations nécessaires, mais qui rendent la préparation un peu rock’n’roll !
Alors plutôt que de lister les problèmes, on trouve des solutions. On nage dans son bureau après le télétravail grâce à Zen 8 (il faut vraiment être en confinement et préparer un IronMan pour en passer par là 😉), des séances en force sur home-trainer, roue avant surélevée pour s’habituer à la montagne, et des courses matinales. Au final, l’hiver et le printemps restent sportifs.
Quand arrive avril, on se dit quand même qu’on ne sera jamais prêt pour mi-juin, et la motivation en prend un petit coup… L’organisation envoie un mail précisant que si l’on veut, on peut faire l’impasse sur la natation vues les circonstances. Je ne sais pas si c’est une bonne ou une mauvaise nouvelle.
Et le président annonce le décalage d’une semaine des élections municipales. L’effet papillon fait le reste… L’organisation IronMan nous informe que les élections tombant finalement durant l’épreuve, elle est contrainte de décaler cette dernière au 12 septembre. Résultats : 3 mois de préparation supplémentaires, pendant les congés d’été, avec les Pyrénées en ligne de mire et le pays basque à suivre, tout en étant encore assez frais car pas mal en retard sur le plan de marche. Ouf !
Fin août, après 3 mois intenses, sérieux et motivés, me voilà fin prêt pour en découdre.
Chapitre 2 : quand tu fais une erreur de débutant qui peut te ruiner l’effet papillon
Pour les moins capés d’entre vous, sachez une chose concernant le vélo : quand ça monte, c’est plus difficile. Ça parait évident, mais à deux semaines du départ pour le sud, je réalise que j’ai gardé ma cassette 12-25 sur mes roues de montagne, qui du coup ne le sont qu’à moitié. C’est passé à l’entrainement sur les cols pyrénéens, mais sur des sorties courtes, et sans marathon derrière… Avec un corps de cassette Campagnolo un peu spécifique et des problèmes d’approvisionnement dus au contexte sanitaire, il m’a fallu cravacher dur pour entendre le 15ème vélociste contacté me dire avoir ce qu’il faut, soit une cassette 11-26 (on prend toujours), qu’il m’installera la veille du départ en train, à une heure de la fermeture. Comme dirait Hannibal, j’adore quand un plan se déroule sans accroc.
Le lendemain, vendredi 10 septembre, me voilà parti pour Nice via Paris, le sac fait, le vélo empaqueté avec sa dent en plus, les groupes d’amis et la famille au taquet côté encouragement, les bracelets porte-bonheur partagés avec femme et enfants au poignet, tous en attente de voir le curseur en mouvement sur l’application de suivi de l’épreuve. Bon ben maintenant, va falloir finir ce qui a été commencé !
Chapitre 3 : quand tu entres dans l’ambiance, mais pas encore dans le vif du sujet
Arrivé à l’hôtel, je file prendre mon dossard et me retrouve dans le village IronMan. On ne peut pas être blasé par cette ambiance, cette pression qui monte, la rencontre avec les autres participants… C’est prenant, c’est grisant et tellement agréable. Et on voit plein de belles machines ! En les regardant de près, on voit d’ailleurs qu’elles sont montées en 28, 30, voire même 32 parfois à l’arrière. Me vient alors cette question toute bête : qu’est-ce que je fous là ? Et je m’en veux d’avoir étais si négligent, alors que j’ai dû lire une dizaine de reconnaissance du parcours ! Je me rassure, à la piscine, Damien m’a dit que le parcours n’était pas si terrible.
C’est fait c’est fait, haut les cœurs. Ça va le faire et puis il n’y a plus vraiment le choix.
Le lendemain, je retrouve Éric (Martin) et Christopher (Guinais) du club, inscrits sur le half, pour une sortie vélo tranquille de remise en jambe. A l’arrivée, Éric me débriefe du parcours vélo, qu’il a déjà fait quelques années auparavant, et me précise les pièges et les difficultés. Il me met en garde : le parcours a été modifié, et se prend 400m de D+ supplémentaire, et la dernière difficulté, au km 112, est une montée à 6-7% qui est passé de 2 à 10 km… Ben je suis content de ma dent en plus. Ça va faire du tout à gauche, mais ça va le faire. Si si…
Dépose du vélo au parc à vélo en fin d’après-midi. Le soir à l’hôtel, je compare tous les cols pyrénéens faits cette année ou par le passé, ceux du parcours, et je me dis que ça va passer. Et dodo…
Chapitre 4 : quand tu restes dans l’ambiance, et rentres enfin dans le vif du sujet
Décollage matinal en tram vers le départ. Petit passage de contrôle au parc à vélo, et hop, dans la combi, et on s’installe en spectateur pour voir partir de nuit les concurrents du 70.3. Courage et bonne chance à Éric et Christopher !
Une heure plus tard, c’est à notre tour. Je prends place dans le SAS 1h15. Et c’est parti ! L’eau est bonne, la bouée juste en face, il n’y a plus qu’à tourner les bras. Passer une première bouée, puis une deuxième, et enfin une troisième pour virer de bord… ah non, y’en a encore une autre plus loin (ben t’es sur un IronMan mon gars, faut nager quand même). Bon, ben grâce au coach Foresti je « nage jusqu’à la bouée », et je vire de bord sur la gauche, destination la prochaine. C’est bien la nage matinale dans la baie des Anges, avec ce superbe levé de soleil ! Soleil qu’on a en pleine poire, et du coup, impossible de voir la bouée à viser. C’est pas grave, on va suivre les gars devant. Ah ben non, ils ont disparu aussi ! La vue finit par s’habituer, on se remet dans l’axe et on finit son tour et on entame le deuxième. Tout se passe nickel.
L’arrivée de la nat’ est dans 150m. C’est à ce moment-là qu’un concurrent me passe devant avec une trajectoire perpendiculaire à la mienne. Je pense qu’à l’heure où j’écris ces lignes il a dû enfin tourner, à moins qu’il ne soit dans les Calanques à Marseille. Après 1h16 dans l’eau, j’atteins l’aire de transition.
Maintenant que j’ai compris la signification du dernier terme d’Alpes Maritimes, je vais me confronter au premier ! J’enfourne le vélo, et c’est parti ! Tranquille quand même, car ça va être long et pentu. J’ai toujours en tête le nombre 26 qui me taquine. Je sais que dans 10km, il y a un des plus gros pourcentages du parcours, et ça me donnera un bon repère. Une fois passé, je sais que je n’ai plus à m’inquiéter : ce sera bon, même s’il faudra sans doute quand même envisager de tout mettre à gauche par moment. Par contre, c’est sans parachute ventral et sans filet cette affaire : faudra pas de défaillance !
Le parcours dans l’arrière-pays niçois est magnifique. Ça monte, ça monte, ça monte, ça descend, ça monte, ça remonte… Mais tranquille. Mais ça monte. Le col de l’Ecre n’est en soit pas difficile, mais plus de 20km de montée non-stop, ça ne laisse aucun répit ! A l’allure où l’on va, on peut néanmoins taper la discute avec les autres concurrents. De toute façon aujourd’hui, je ne vise aucun temps, je suis juste là pour en profiter, terminer, et m’en mettre plein les yeux et autant dans les jambes. Les arbitres sont cools avec nous (les plus lents donc), et ne disent rien dans la montée quand il y a des regroupements (je confirme que de toute façon, il n’y a pas d’aspiration).
Au bout de 60 km, c’est l’arrivée au sommet, et je sais que j’ai fait le plus dur, même si la journée n’est pas finie. S’en suit une traversée de plateau assez vallonnée, avec quelques descentes pour récupérer, des montées pas trop méchantes mais de plus en plus casse-patte. Vont venir encore 3 difficultés, alors que je n’en attendais qu’une… La première sera une descente vers le km 100. Si si… Celle qui longe les clues de Gréolière. Ça va très vite, et mon vélo commence à faire des bruits (très) bizarres et les freins se font capricieux. Et surtout, le côté droit de la route tombe à pic à 200, 300 m en contre-bas, peut-être plus : je ne peux pas vous dire car sujet à un vertige maladif, je suis incapable de regarder. Personne ne m’avait prévenu sur ce coup. L’idée de poser le vélo et d’arrêter là me traverse l’esprit. Pour comprendre le vertige, c’est un peu comme si après avoir bu 5 verres d’alcool et fait 10 tours sur vous-même, vous vous preniez un grand coup derrière la tête : vous n’êtes plus très lucide, la tête se met à tourner, vos jambes sont en coton, vous ne savez plus très bien où vous êtes. Bref, vous n’êtes pas au meilleur de votre forme. Puis ça vous revient : vous êtes à 45km/h dans une descente de montagne avec des freins capricieux… On s’arrête, on reprend ses esprits, et on repart tranquille. La route se fait moins impressionnante, et on peut relancer. La séquence a dû durer 30 secondes, mais elle m’a paru durer bien plus. Le vertige, c’est super nase !
Arrivé en bas, au km 112 , c’est reparti pour 10km d’ascension à 7%. Dernière difficulté musculaire du parcours. Je l’avais plutôt bien anticipée, et j’ai pu gérer sans trop de mal, mais tout à gauche quand même… Arrivé en haut, on sait que c’est la fin des montées pour la journée. Une grosse descente de 30 km pour récupérer avant le marathon, et avec une route civilisée, qui ne va pas me faire le coup de sa copine de tout à l’heure. Par contre, l’état du vélo s’empire (révisé pourtant en juillet). Heureusement, en début de descente, un camion d’assistance technique de l’organisation est à disposition. Je confie mon vélo à un mécano qui me rassure sur mes freins, les règle comme il peut, resserre ma direction qui commençait à jouer… L’arrêt forcé au stand me permet tout de même de récupérer un peu.
Dans la descente, impossible de passer la plaque, ça ne répond plus. Le vélo fait toujours plus de bruits, et je n’ose pas lâcher les chevaux. Ce sera une descente un peu crispante et frustrante, en laissant passer pas mal de monde, mais je ne suis pas là non plus pour me mettre en danger.
Sur les derniers kilomètres de plat, le bruit a disparu, les jambes sont plutôt bonnes, je relance sans trop de mal et atteins enfin le parc à vélo, après 7h50 de selle.
Comme pour la première transition, je prends mon temps pour changer de discipline, et c’est parti pour le marathon. Ou plutôt, pour les 4 fois 10,5 km, voire même les 8 fois 5 km… Mentalement, c’est tellement plus facile de partir sur 5 km. Une fois que c’est fait, on recourt 5 km. Et après, on recommence. Et ça passe tout seul (ou presque). Je m’efforce de ne jamais marcher en dehors des ravito. Ces derniers sont placés tous les 1,7 km, et font 15 m de long environ. Donc 15 m de marche tous les 1,7 km (la St-Yorre est mon amie), c’est comme du fractionné long 😉. Les bénévoles sont top, encourageants et joyeux, ça fait super plaisir. J’avais un peu peur d’un parcours de CAP un peu monotone avec 4 A/R sur la promenade des anglais, mais il y a de l’ambiance tout le long, et on croise tout le temps du monde. Je double une concurrente prénommée Carole, qui marche car épuisée à mi-course. Ça la motive, elle redémarre et me double. Plus tard, je la repasse alors qu’elle marche à nouveau. Et rebelotte. Je la rattrape à nouveau et lui dis qu’elle devrait à nouveau me passer. Elle redémarre effectivement, mais ne me double pas : on va discuter, sympathiser, s’encourager et courir sans ralentir pendant 15 km. Belle rencontre. Elle a un tour d’avance sur moi, et alors que je la félicite pour la fin de son premier IronMan, je repars seul pour mon dernier tour (elle a refusé ma proposition de m’accompagner sur mon dernier tour…). Je cours avec un auvergnat quelques km, le distance ensuite et arrive enfin sur la finish-line, pour 4h40 de course à pied.
A défaut d’avoir fait un bon temps, j’ai rentabilisé mon inscription, et surtout pris beaucoup de plaisir. C’est toujours une aventure ce type de course, et ça procure tellement de sensations !
Chapitre 5 : quand c’est fini mais pas tout à fait
Passé la ligne, je reçois ma médaille de finisher, et Covid oblige, un masque floqué IronMan, impossible à enfiler car trop épais pour respirer après autant d’effort, et un superbe T-shirt de finisher.
Je récupère mes affaires de ville et destination la zone de ravito pour boire, manger, boire, remanger (surtout des frites, le reste ne passe pas), et déguster une pastèque magique, et partager sa journée avec les autres concurrents.
Et on allume son téléphone pour rassurer ses proches, et on constate sur les groupes WhatsApp qu’on a été le héros de la journée, et que tous se sont pris au jeu et ont suivi le parcours en temps réel ! C’est sympa d’être le héros du jour. Valait mieux finir quand même…
Très belle expérience que je recommande à tous ceux qui n’y ont pas gouté. Ça demande de l’investissement en temps d’entrainement, donc ça doit avant tout être un projet familial, mais c’est accessible à toute personne en bonne santé, avec du 26 à l’arrière quand même… »
LeRaf
Résultats IronMan Nice 2021 :
Place | NOM | Prénom | Temps | Club | Catégorie |
1 | POUILLY | Félix | 08:47:33 | RONCQ Triathlon | Masculin |
759 | GASQUET | Raphaël | 14:05:35 | TCN | Masculin |
Résultats IronMan 70.3 Nice 2021 :
Place | NOM | Prénom | Temps | Club | Catégorie |
1 | STORNES | Casper | 04:00:25 | E.C. Sartrouville Triathlon | Masculin |
488 | MARTIN | Eric | 05:49:00 | TCN | Masculin |
1115 | GUINAIS | Christopher | 06:38:37 | TCN | Masculin |
1248 | CONSEIL | Julien | 06:52:24 | TCN | Masculin |
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