Le matériel vélo

Quelque soit la distance du triathlon, le 3athlète va passer environ 50 % de la durée de l’épreuve sur le vélo, et le degré de fatigue à la pose de celui influencera grandement la partie pédestre.

Je crois que depuis presque 25 ans que j’entraîne, la question au niveau du matériel que l’on m’a le plus posé concerne le choix des roues. Je considère que c’est dommage, car beaucoup d’autres paramètres (en dehors de entraînement) se doivent d’être exploités et optimisés, surtout que quand je questionnaire sur ses cotes, ses plateaux, étagement de sa k7, je n’obtiens que peu de réponses.

Il semble y avoir un mythe de créer autour de cette partie du vélo, et de penser que juste changer ses roues va grandement modifier sa performance vélo.

En préambule, je dirais que n’oublions jamais que 60 à 80 % de la résistance à l’avancement est crée par le CYCLISTE, plus que par la machine proprement dite.

Ceci veut concrètement dire, que l’on va devoir chercher à optimiser la position aérodynamique.

LE GUIDON AERODYNAMIQUE

Le guidon aérodynamique ou clip on, le fameux guidon de triathlète, qui aurait permis à Greg LEMOND de gagner le Tour de France 1989, faisant l’écart, grâce à lui, sur Laurent FIGNON.

Pour un triathlète, l’intérêt pour moi est double :

a/ être plus profilé

b/ soulager le haut du corps, et ainsi mieux récupérer de la partie natation. (et préparer le cap qui suivra derrière). Sans guidon aéro, les biceps jouent le rôle d’amortisseur, et les épaules sont elles aussi mises en tension.

Je remarque que beaucoup ne roule pas suffisamment en position aérodynamique à entraînement, et pour être confortable le jour de la course, les muscles spécifiques pour maintenir la posture doivent avoir été sollicités sur de longues périodes.

Même pour ceux qui font du triathlon avec drafting, j’encourage souvent à avoir le petit ajout pour la raison précipitée et parce que aussi vous pouvez amener à vous retrouver à l’avant d’un groupe, ou carrément en chasse patate entre deux groupes.

Avoir les vitesses en bout de cintre, peut être parfois un plus, encore plus maintenant, avec les dérailleurs électriques, on peut mettre deux shifters, un en bout cintre et un au guidon.

Pour ceux qui font du long, système de bidon par pipette est aussi aussi une bonne option (on boit plus souvent et on ne casse pas la position aéro pour boire), plus que les bidons qui se fixent derrière la selle, qui sont souvent instables, et difficiles à manipuler.

Certains comme Lionel SANDERS avait fait le choix en 2015 du Camelback sous le maillot (Bobby JULICH avait fait lui aussi ce choix une année sur un CLM sur le TdF), mais avait reconnu lui même que c’était une erreur.

Il a longtemps été conseillé d’avoir les avant bras parallèles au sol, avec un angle bras/avant bras à 90 degrés. On a tendance à voir de plus en plus de positions mante religieuse, l’un des précurseurs de cette position avait été Floyd LANDIS, il y a une quinzaine d’années.

Le même principe poussé à l’extrême (attention le cycliste pro fait des CLM qui durent rarement plus de 1 heure, et n’a pas à courir après)

Les futures évolutions ont surtout l’air de se faire au niveau des pads, c’est à dire où l’on vient poser ses coudes, pour encore plus d’aérodynamisme et de confort. Les imprimantes 3D semblent aider pour arriver à de tels modèles. Ici le guidon de Victor CAMPENAERTS lors de son record de l’heure.

Attention quand même à ne pas placer les pads trop près les uns des autres afin de ne pas avoir trop de soucis pour contrôler le vélo, de même adopter une position que vous êtes capables de garder longtemps, qui vous permet de rouler sans vous crisper, ne vous bloque pas la cage thoracique, et compresse trop les organes digestifs.

LES CASQUES

En dehors de protéger ce que vous avez de plus précieux, votre cerveau, un gain important peut être réaliser de ce coté là. J’ai longtemps été sceptiques concernant les casques aéro, mais parfois avec une centaines d’euros, on peut avoir un gain équivalent, à une paire de roues qui en valent 10x plus, pas forcément le casque à pointe (Comme Lance ARMSTRONG à la grande époque de l’US POSTAL (sur un LITESPEED Blade titane rebadgé en TREK), mais avec une forme beaucoup plus arrondies. (Veillez à ce qu’il soit suffisamment ventilé).

LES CADRES

Le carbone semble avoir été envoyé aux oubliettes l’alu, l’acier, le titane. C’est à mon avis dommage, d’un point de vu confort et durée de vie.

A part quelques marques comme VENTUM, CERVELO PX5, on reste sur des géométries assez classiques (les cadre CORIMA, SOFTRIDE, SLINGSHOT, CHEETAH, ZIPP, …ont disparus..)

Concernant les cadres de chronos, ils sont plus certes rapides (parfois aussi facilement 2kgs plus lourds qu’un cadre plus classique, mais apparemment pas handicapant tant que la pente n’excède pas 6%), non pas forcément uniquement par la forme de leur tube, mais surtout parce que vous allez pouvoir être assis beaucoup plus en avant par rapport à l’axe du boîtier de pédalier.

En plus, comme en triathlon, on ne subit pas la règle UCI des 5 centimètres  en arrière du boîtier de pédalier, on peut y aller (Il ferait mieux de contrôler autre chose)(poids du vélo mini 6800 grammes).

Cette règle des 5 cm est à l’origine des selles courtes, car au départ certains coupait le bec, pour rentrer dans les clous et moins attirer l’œil des commissaires

Cet avancement a plusieurs avantages

a/ Ceci permet de recruter un peu plus les chaînes musculaires antérieures (on épargnera les chaînes postérieures pour la cap),

b/ De pouvoir ouvrir un peu plus l’angle des hanches,

c/ Et enfin descendre un peu plus le cintre.

Pour l’athlète qui ne posséderait pas un cadre de chrono (76-80 degrés), il y a moyen sur un cadre route (73-74degrés) de mettre une tige de selle inversée qui vous permettra de vous rapprocher du boitier de pédalier.

 

Il a même existé les premières années de la discipline, un système (le Seatshifter) qui permettait (en roulant) d’avancer plus ou moins sa selle suivant le dénivelé (en cotes, on recule, sur le plat on s’avance), utilisé à Nice par exemple par Mike PIGG, l’un des meilleurs cyclistes que le triathlon ait connu, dans les années 90.

LES MANIVELLES

Quand j’ai commencé le triathlon, on considérait que les manivelles devraient être un peu plus longues lors que l’on fait du CLM, c’est à dire qu’un cycliste qui permettait normalement des 172.5mm, passait sur des 175mm le jour du chrono. On augmentait le bras de levier.

En 2011, Craig ALEXANDER (1.80m) a gagné Hawaii en mettant des manivelles plus courtes qu’habituellement (passe de 175mm à 167.5mm) la mode était lancée.

Avoir des manivelles plus courtes permettraient de pouvoir descendre encore un peu plus le poste de pilotage, (le genou remontera un peu moins haut avec des manivelles moins hautes quand la manivelle passe à midi), et solliciterait moins les fléchisseurs de hanche (judicieux ds une logique de cap derrière).

Les manivelles doivent elles être proportionnelles à l’entrejambe et/ou la hauteur de selle?

Jan FRODENO à 860mm de hauteur de selle et roule avec de 172,5mm. Miranda CARFRAE à une hauteur de selle de 670mm et roule avec des 165mm, donc je dirais que non 😉

LES PLATEAUX

Les plateaux ovalisés semblent eux aussi de moins en moins nombreux.

J’ai acheté mes premiers plateaux Harmonic (en 1995, développé par Cyril GUIMARD) car mécaniquement parlant, l’idée de supprimer les points morts à 6h00 et à midi me semblaient intéressant.

Aucune étude (indépendante) n’a réellement montrée de gain. C’est plus au ressenti de l’athlète. Ceci dit je pense que cela avantage les mashers (ceux qui tournent moins les jambes) que les spinners (ceux qui tournent beaucoup les jambes).

Longtemps utilisés par Chris FROOME et Bradley WIGGINS, ils semblent plus ou moins avoir disparu des plateaux pro (et du top ten de Kona).

La plupart des vélos actuellement vendus sont équipés en pédalier compact, 50×36 voir 50×34, et je trouve que vu la région dans laquelle nous sommes, c’est souvent trop peu.

a/ pour développer la force spécifique

b/ pour favoriser une bonne ligne de chaîne (mieux vaut être grand plateau et milieu de k7)(c’est pour cela que les spécialistes des chronos peuvent mettre des 56 ou de 58 dents devant).

c/que cela a été montrer que sur les petits pignons (10-11-12),, les frictions mécaniques étaient supérieures . De plus si l’athlète lambda met déjà le 36 dents dans les côtes du coin, que va t’il mettre quand il va aller faire des courses comme Embrunman ou Altriman?

Venu tout droit direct du monde du VTT, certains triathlètes (sur certaines courses) passent au mono plateau, à l’image de Vincent LUIS, qui avait récemment à Daytona un mono plateau de 52 et un K7 de 10-28. Pour celui qui ne dispose que d’un vélo et pas d’un mécano à sa disposition, voilà bien le genre de montage que je n’encourage pas.

Les pros à Hawaii mettent souvent le combo 55/44, non pas forcément pour être 55×11, mais pour rester le plus souvent milieu de K7, et pour également avoir une réserve suffisante, car après le demi tour, il y a un long faux plat descendant, où il y a souvent vent de dos.

Pour info, Lionel SANDERS, lors de son récent record de l’heure (Canada) avait un 60×13…

LA CHAINE

Élément de transmission par excellence, elle se doit d’être entretenue et changer régulièrement pour optimiser le rendement. Un ancien athlète élite de D1 de Sartrouville, Franky BATELIER, m’avait avoué changer sa chaîne plusieurs fois par an. « On s’embête à gagner 10 watt au seuil, alors que l’on peut facilement avoir ce gain avec une transmission optimisée, en plus cela prolonge grandement la durée de vie de la K7 ».

Bien sur, plus il y a de pignons (en 20 ans, on est passé de K7 8v à 12v), plus la chaine est fine, et donc plus elle est fragile.

Les galets oversize type Ceramic Speed viennent aussi diminuer les rayons de courbure, et ainsi diminuer les frictions (idem pignon de 10-11-12).

Des traitements spécifiques à base de polymères sont maintenant également appliqués pour là aussi limiter les frictions, mais la règle de base c’est de toujours avoir une chaîne alignée, correctement propre et huilée. (beaucoup de saleté va se caler dans les galets également).

LE REGLAGE DES CALES

N’oublions jamais que chaque sport a une influence directe (positive ou mauvaise) sur la discipline suivante.

Trop en jambes en natation, un taux lactate qui monte en flèche, et moins de watt en vélo, un mauvais recrutement musculaire sur le vélo (point abordé plus haut), et une cap parfois désastreuse derrière.

Nous avons vu que l’avancé de la selle permet de moins solliciter les chaînes musculaires postérieures, il en a de même pour le placement des cales.

Certains athlètes (Daniela RYF ou Diana RIESLER par exemple) n’hésitent pas à placer leur cale presque au milieu des chaussures vélo. Certaines fibres des mollets sont ainsi bien sollicité (et il y a plus de force de générée sur les pédales).

On est donc là aussi très loin du positionnement cycliste plus classique basé sur les métatarses…

LES PNEUS OU BOYAUX

Pneus, boyaux, tubeless, …

A une époque les roues haut de gammes n’étaient livrées que pour les boyaux. Le poids total de la roue était souvent inférieure. Maintenant cela a bien changé, et je pense que le rendement des pneus est aussi performant que des boyaux. En tout cas, si vous faites du long, mettez quelque chose où vous vous sentez en confiance pour rouler mais aussi pour réparer. On a tous en mémoire la chute de Joseba BELOKI, qui avait déjanté suite à un problème de colle. Les chambres latex sont peut etre plus légères, mais je remarque qu’elles sont souvent très (tro) fragiles.

Si je devais conseiller une marque et un modèle de pneu. Continental Grand Prix 4000 (pas encore essayé les 5000m), en 25 de section.

LES ROUES

A mon commencement dans le triathlon, les athlètes mettaient parfois une roue de 650 devant, une roue de 700 à l’arrière. Après j’ai connu (j’en ai eu 3) des vélos équipés en 650, qui avait pour objet de rendre les vélos plus nerveux (ce qui étaient vrais, surtout en relance). L’UCI a interdit que les deux roues soient de diamètre différent.

Pour les CLM, il semble y avoir consensus que la roue la plus aérodynamique à l’arrière soit la roue pleine (lenticulaire ou paraculaire (les revetements en kevlar type J Disc en kevlar ont eux aussi disparu)(interdit à Kona).

Certains énergumènes comme Richard VIRENQUE ont tenté deux lenticulaires sur certains chronos. On sait bien qu’en terme de maniabilité ce ne doit pas être le top..

La roue avant subit le vent latéral (la roue arrière très peu), donc il vaut etre très vigilant quand à son choix, suivant les conditions de courses.

Une jante trop haute pour rendre le vélo difficile à tenir, et à augmenter les crispations.

Le meilleur temps vélo à Kona n’a pas toujours la jante la plus haute à l’avant : Cam WURF, ce gars là s’y connait un peu en vélo 😉

Il sait surtout que le vent latéral peut être très important là bas.

CONCLUSION

A l’heure de tous les arguments marketing, chaque matériel est vendu pour faire gagner x Watt.

Je remarque quand même avec expérience, que trop de rigidité sera préjudiciable. Si ce n’est pas le matériel qui filtre, cela sera votre squelette, et moins on sera puissant, moins on aura intérêt à rouler sur du matériel trop rigide. Le monde de la soufflerie c’est bien. La réalité de terrain en est une autre, et en 30 ans de triathlon, j’ai vu peu d’athlètes avec des FTP à 450watts.