« J’ai tendance à me dévaloriser, mais cette victoire m’a aidée à prendre confiance en moi »
Peux-tu te présenter en quelques mots et nous raconter ton histoire avec le triathlon ?
Je m’appelle Aurélie Decaux, j’ai 28 ans, j’exerce le métier de dentiste et je suis licenciée au TCN depuis 4 ans. Je viens d’une fratrie recomposée de 5 enfants avec une mère agent immobilier et un père menuisier. Dans ma famille, personne ne fait de sport.
Quand j’étais plus jeune, mes deux hobbies c’était le piano et la GRS (Gymnastique Rythmique et Sportive), j’ai fait les deux simultanément pendant une dizaine d’année, jusqu’à devenir juge de GRS durant mon adolescence ! Au lycée, j’adorais les cours d’EPS, (sauf la piscine, mon prof m’appelait Laure Manaudou ironiquement), je voulais avoir de bonnes notes et quand j’étais la meilleure des filles, c’était la cerise sur le gâteau. J’avais déjà un penchant pour les sports individuels puisque ma note ne dépendant que de moi. En fait, j’avais déjà un esprit de
compétition, acquis en partie par la GRS où les filles ne sont pas tendre entre-elles. J’ai aussi fait un an d’aviron licenciée via mon lycée, le côté un peu « bourrin » sur un ergomètre ou un bâteau me plaisait, ça changeait de la GRS. Et la grosse différence, c’est que c’était un sport extérieur. Donc globalement, je dirais que j’ai toujours aimé le sport, même si je n’en avais pas une pratique très intensive. En tout cas, j’étais toujours motivée !
Puis entre la fin du lycée et les études supérieures, j’ai arrêté l’aviron, la GRS et le piano.
Pendant mes 2 premières années d’étude en médecine, je me maintenais en forme avec une séance de Pilates et un à deux footings par semaine histoire de me vider la tête. C’est durant mes années d’études en dentaire que j’ai commencé à avoir une activité physique plus soutenue, ça m’avait beaucoup trop manqué. J’ai commencé à toucher un peu à tout : escalade, gym tonique, danse de couple, natation et surtout aviron que j’ai pu reprendre. J’y ai rencontré Pauline Robin, le début d’une histoire d’amitié. C’est d’ailleurs grâce à elle que j’ai eu envie de me lancer dans le triathlon. Je l’admirais car elle était forte en aviron, et quand j’ai appris qu’elle s’était mise au triathlon, j’ai eu envie de passer le cap et d’essayer à mon tour. Ce sport m’impressionnait mais la natation me faisait peur !
En juin 2019, juste avant l’été de la fin de mes études, j’ai donc participé à mon premier triathlon, un XS à Saumur. Je m’étais mise au vélo quelques mois plus tôt après avoir acheté un vélo de cyclocross d’occasion. C’était une totale découverte, et bien sûr j’ai adoré ! Et quelques mois plus tard, en septembre 2019, je suis arrivée au TCN.
Aujourd’hui tu as un niveau très honorable, est-ce que tu peux nous raconter ton évolution ?
Grâce à l’aviron j’avais le cardio et les muscles, mais j’étais débutante en triathlon, il y avait du chemin à faire. J’arrivais à peu près à suivre en course à pied et à me débrouiller en vélo et natation. Malheureusement ma première année, c’était les débuts du COVID, je n’ai pas pu faire de compétition.
C’est donc à ma deuxième année au TCN que j’ai sérieusement commencé à m’entraîner. Mon objectif, c’était le Chtriman L à Gravelines, un peu fou finalement pour une débutante. Je m’entraînais tous les jours en faisant ma propre prépa : 3 natation (4 en période de blessure), 3 séances de course à pied dont une sortie longue, 3 à 4 sorties vélo dont 1 home trainer par semaine. Un mois avant mon objectif, j’ai fait mon premier M (et mon deuxième tri), lors duquel je termine 3e féminine, ça m’a donné une certaine confiance pour mon objectif. Et pour le Chtriman, j’ai terminé 6e féminine. J’étais super fière et vraiment émue, mon investissement de 5-6 mois avait payé, et surtout, j’ai compris que le L allait sans doute devenir une histoire d’amour.
Ma troisième année au TCN, je me fixe comme objectif le L des Sables d’Olonne. J’avais prévu d’être 6 mois à la Réunion cette année-là. Pas vraiment le terrain adapté pour s’entraîner sur du plat, mais le contexte était idéal car j’avais du temps. J’avais pris l’aide d’un coach qui me préparait des séances à distance selon mon emploi du temps. Ça m’a vraiment aidé à passer un petit cap en course à pied et en cyclisme, je faisais par exemple beaucoup de spécifique.
A la Réunion j’ai fait le triathlon 0-3000, 7h d’effort et sans doute la course la plus difficile à laquelle j’ai pu participer jusqu’à présent, mais qui fait passer des caps mentalement…
J’arrive donc au 70.3 des Sables en forme, avec comme objectif secret l’obtenir un slot pour me qualifier aux Championnats du monde d’Ironman 70.3. Mais c’est la grosse déception puisque je termine 7e de ma catégorie, insuffisant pour obtenir mon ticket d’entrée.
Cette année, c’est ma quatrième année au TCN. Je me suis fixé 2 objectifs : le Triatbreizh L en mai et le Bayman L en octobre, 2 objectifs aux extrémités de la saison ce qui va permettre de tester mon corps et mon mental sur une longue période.
On peut dire que l’objectif du Triatbreizh est plus qu’atteint puisque tu as remporté la course, est-ce que tu peux nous parler de ta prépa ?
Honnêtement, je suis arrivée au Triatbreizh après une préparation en dent de scie. J’étais en pleine rupture amoureuse à ce moment-là, avec un appartement qu’on venait d’acheter à revendre. Je jonglais pas mal entre sorties arrosées pour me changer les idées et entraînements. Je n’avais donc rien mis en place de particulier. Je ne suis même pas sortie une seule fois de l’hiver à vélo, me contentant du home trainer par manque de temps. Le jour de la course j’ai tout donné et fonctionné aux sensations comme à mon habitude. Finalement, ça a marché. Je dirais que c’est surtout le cap que j’avais passé l’année d’avant qui m’a permis de décrocher cette victoire, ainsi que les quelques podiums du début de saison qui m’ont donné confiance en moi, ce que je n’avais pas avant. Par contre, post-course j’ai pris 2 bonnes semaines pour récupérer, j’étais fatiguée et je n’avais plus aucune envie de m’entraîner, c’est la première fois que ça m’arrivait aussi longtemps.
A cette période, j’avais des choses à prouver. J’avais envie de me montrer à moi-même et à mes proches que tout ce que je faisais avait du sens, que je ne faisais pas tout ça pour rien. J’ai tendance à me dévaloriser, mais cette victoire m’a aidée à prendre confiance en moi. Le revers de la médaille, c’est que j’ai maintenant une pression supplémentaire comme devoir me maintenir au niveau, car on attend de moi que je termine sur le podium, ce qui n’est pas un sentiment très agréable.
Et pour le Bayman L au Mont Saint-Michel le 30 septembre, mon objectif c’est d’arriver la mieux préparée possible, tester cette longue période d’entraînement. Le must serait de faire un top 5 ou 10, mais je n’ai pas d’objectif de temps car tout L est différent. J’y participe avec Axel, également TCNiste, avec qui je m’entraîne et partage ma vie désormais. Nous avons pris un coach pour l’été, lorsque les séances au TCN se font un peu plus solo. Cela m’aide aussi beaucoup pour rester motivée. Être avec un autre triathlète, ça motive et ça permet de progresser à deux encore plus vite.
Comment tu vis ce quotidien rythmé par les entraînements et les courses, est-ce que t’en as marre parfois ?
Pour le moment non, j’arrive à trouver mon équilibre entre le triathlon et mes activités extra sportives. Je parviens toujours à me débrouiller pour concilier ma vie sociale et mes entraînements, notamment en faisant mes séances avant, pendant ou après les sorties. Par exemple, si ma famille qui vit à Angers me propose de venir déjeuner un midi, j’y vais à vélo. Ou lorsqu’il s’agit d’aller boire un verre ou faire un resto en semaine, j’arrive après ma séance de sport. Mes amis ont l’habitude maintenant que j’arrive la dernière. Après, bien-sûr, je suis souvent obligée de prioriser et pour le moment, mes autres activités passent après le sport. J’adore le cinéma par exemple, mais je prends rarement le temps de me poser devant un film ; j’aimerais reprendre le piano, mais je sais que je n’aurais pas la patience pour le moment !
J’ai aussi la chance d’être avec quelqu’un qui partage ma passion, il n’y a donc aucune tension concernant le temps que je veux dédier au sport ou la façon dont je souhaite prioriser mes activités. C’est génial, on se comprend et on planifie notre vie autour de ce sport, ensemble. Pour donner un exemple, je voulais me remettre à la danse de couple à la rentrée, j’en ai parlé à Axel qui était partant, ce qui est génial. Mais j’ai tout de même énormément réfléchi avant de nous inscrire, j’avais du mal à accepter qu’une soirée de la semaine serait « perdue » pour faire cette autre activité. J’ai fini par trouver un compromis avec moi-même en me disant que j’allais doubler une séance le jeudi… Bref, il y a toujours une solution finalement quand on est un peu toquée ! Tout ça pour dire que oui, le triathlon prend énormément de place dans ma vie aujourd’hui, parfois ça me casse un peu la tête, mais je le fais car ça m’apporte énormément au quotidien.
C’est super alors, tu arrives à performer tout en continuant à prendre du plaisir dans ton sport, qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour la suite alors ?
De continuer à me fixer des objectifs et les atteindre. D’ici 1 an j’aimerais courir un marathon, et je me fixe le challenge d’un full Ironman à mes 30 ans. En attendant, je vais continuer à m’entrainer avec le TCN, un coach en période de creux, courir une dizaine de courses à l’année et me fixer 1 à 2 half par an, tout en dédiant du temps à la danse de couple avec Axel. Ça va nous changer du triathlon et nous faire du bien !
Puis peut-être d’ici quelques années, pourquoi pas faire de ma passion pour le sport et la cuisine un changement de métier en devenant diététicienne du sport ?
Propos recueillis le 2 août 2023 par Julie TRANG
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